"Le vent souffle dans notre direction". Maître Travers, l'avocat de Max Schrems dans l'affaire du Safe Harbour jubilait dès la première pause au milieu d'une longue audience devant la Cour européenne de justice, le 24 mars à Luxembourg (
affaire C-362/14
).
Pour rappel,
Max Schrem
, un juriste autrichien, conteste le transfert de ses données par Facebook à la NSA, l'Agence de sécurité nationale américaine
La question préjudicielle posée ce jour-là aux juges réunis en “Grande chambre” n'est pas…
Raison d’État versus liberté civile
Lorsque l'avocat général de la Cour, Yves Bot, se prononcera le 24 juin prochain sur l'affaire «Schrems», son avis portera bien au-delà de l'anecdote du jeune juriste autrichien qui tient tête à Facebook et à la machine de surveillance américaine depuis 2007. C'est la question de la primauté des libertés civiles sur la raison d’État qui est posée.Le rapporteur de la Cour, a d'ailleurs insisté sur ce point en soulignant que dans le cadre du Safe Habor, c'est la raison d’État américaine qui l'a emporté sur le droit européen. Or, les juges européens ont déjà tranché par deux fois au moins en faveur des citoyens. Ils l'ont fait dernièrement dans leur arrêt Digital Rights Ireland en avril 2014, sur la directive "rétention des données de communication électroniques."Ils avaient déjà tranché dans ce sens dans les arrêts ZZ contre le Royaume-Uni et Kadi (II) rendus en 2013. Ils avaient alors remis en cause le pouvoir d'appréciation de la Commission pour inscrire une personne sur la liste des individus soupçonné de terrorisme, sans lui en faire connaître les raisons. Le principe de "proportionnalité" était alors au centre du débat.Trois affaires, trois constantes : la lutte contre le terrorisme justifie-t-elle de sacrifier les droits fondamentaux des citoyens ? Les deux questions posées par Yves Bot durant l'audience du 24 mars ne permettent pas de préjuger sa réponse : la Commission avait-elle l'obligation d'"assurer" un niveau de protection "adéquate" lors du transfert des données européennes vers les États Unis ? Les citoyens ont-il un droit de recours comme le prévoit la Charte des droits fondamentaux ? Poser la question, c'est déjà un peu y répondre.