L’exécutif a fini par choisir un élu pour la présidence du régulateur ferroviaire et routier, et non un haut fonctionnaire. Mais, contre toute attente, ce n’est pas le député PS du Calvados, Philippe Duron, grand favori, qui a été proposé le 11 juillet, mais Bernard Roman, député PS du Nord.
Cadeau à Martine Aubry
"Je sais que François Lamy voulait se présenter sur ma circonscription, mais je serai moi-même candidat. Je tiens à rester député de la 1re circonscription", avait déclaré le député nordiste, questeur et membre de la commission des Lois, dans un entretien à la Voix du Nord, le 6 juillet 2015.
Sa nomination, si elle est validée par le Parlement le 20 juillet, permettrait finalement de libérer la première circonscription du Nord, "pour permettre à François Lamy, fidèle lieutenant de Martine Aubry, d’être parachuté", souligne un député socialiste à Contexte.
Un pur jeu d'équilibre au sein de la fédération socialiste du Nord, dont Martine Aubry a perdu le contrôle en juin 2015, quand Martine Filleul, soutenue par Bernard Roman, en a pris la tête contre le candidat aubryiste, Gilles Pargneaux.
Une sorte de sacrifice de dernière minute, mais bien rémunéré, pour le député du Nord. Le tout pour permettre au président de la République d’agiter un drapeau blanc au nez de l’ancienne première secrétaire du parti socialiste en vue de la campagne présidentielle.
Un Hollandais pur jus
Le Lillois, ancien adjoint au maire Pierre Mauroy, était prêt à lui succéder avant que Martine Aubry ne vienne lui couper l'herbe sous le pied en 2001. Il fait partie des députés fidèles à François Hollande.
Ce retraité de la fonction publique territoriale et avocat n’a cessé de critiquer les frondeurs et n'a pas hésité à participer aux meetings du mouvement "Eh oh la gauche" pour faire le service après-vente du bilan présidentiel.
Surprise et consternation du côté des députés
En revanche, il est novice sur les questions de transport. Ce coup politique n'est pas du tout du goût du député UDI Bertrand Pancher, membre de la commission du Développement durable et très actif sur les questions de transport :
En l'espace de huit tweets, il dénonce "cette nouvelle nomination infondée [qui] va contribuer à donner l’image d’un gouvernement qui recase ses copains à des fins purement politiques".
« J’en ai assez de toutes ces nominations politiques, confie-t-il à Contexte, rappelant l'épisode de la désignation de François Brottes à la tête de RTE. J’aurais voté sans problème pour un parlementaire socialiste comme Gilles Savary, Philippe Duron ou encore le président Jean-Paul Chanteguet. Tous les trois ont prouvé leur indépendance. Cette nomination est mal digérée à la commission du Développement durable. Mais la messe est déjà dite. Personne ne votera contre."
Pour l'auteur de la réforme ferroviaire, Gilles Savary, l'Arafer est un "petit objet anonyme qui a donné lieu à une grande manœuvre politique".
"Je suis vraiment ravi de ne pas m'être porté candidat, malgré la pression que j'avais en tant que spécialiste du secteur, car je n'aurais pas pesé lourd dans la balance du calcul politique", ironise le député. Mais c'est un "coup de poker asymétrique, poursuit-il, car Roman est sûr d'être élu, alors que pour Lamy, rien n'est joué."
François Hollande aura encore à disposition quelques postes pour placer ses amis ou courtiser ses ennemis d'ici la présidentielle. La présidence du régulateur de l'Énergie (CRE), en février 2017, en est un, par exemple.
Rendez-vous devant le Parlement
Le député PS va être auditionné par la commission du Développement durable de l’Assemblée nationale le 20 juillet à 9 heures et devant celle du Sénat à 11 heures.